«Francophonie avec le président français Emmanuel Macron» : le leader d’opinion Alain Mabanckou «aboyi na ye»* («rejette»).

ÉTAT FRANÇAIS ET PEUPLES QUI PARLENT FRANÇAIS, UNE LANGUE QUI A DES IMPACTS DANS DES DIFFÉRENTS DOMAINES DE LEURS VIES. La diaspora africaine a ses exigences légitimes des droits des peuples à disposer d’eux-mêmes, même dans cette «Francophonie qui va mal», y compris quand monsieur Emmanuel Macron, le président de la République française proposa au leader d’opinion et professeur dans une université aux USA Alain Mabanckou (né au Congo-Brazzaville dans la ville côtière de Pointe Noire, en 1966) de contribuer aux «travaux de réflexion» que le président français Macron souhaite «engager autour de la langue française et de la Francophonie».

 

"Ka munu ko","Ngai te","Pas moi". Alain Mabanckou rejette.

“Ka munu ko”,”Ngai te”,”Pas moi”. Alain Mabanckou rejette.

 

La lettre de l’écrivain Mabanckou est porteuse d’un certain nombre des idées et des valeurs des Africaines et Africains de la diaspora qui tiennent au changement pour leur prospérité et dignité. Et ceux-ci sont toujours en synergie et symbiose avec les masses des peuples africains du continent Afrique. Le MAGAZINE NGAMBO NA NGAMBO publie cette correspondance de Mabanckou Alain. «Na sanza ya yambo o mobu 2018, Alain Mabanckou awuti koboya.Tala mokanda mua ye»*:

 

Monsieur le Président,

Dans votre discours du 28 novembre à l’université de Ouagadougou, puis dans un courrier officiel que vous m’avez adressé le 13 décembre, vous m’avez proposé de «contribuer aux travaux de réflexion que vous souhaitez engager autour de la langue française et de la Francophonie.»

Le président français Emmanuel Macron et son projet.

Le président français Emmanuel Macron et son projet.

 

Au XIXème siècle, lorsque le mot «francophonie» avait été conçu par le géographe Onésime Reclus, il s’agissait alors, dans son esprit, de créer un ensemble plus vaste, pour ne pas dire de se lancer dans une véritable expansion coloniale. D’ailleurs, dans son ouvrage «Lâchons l’Asie, prenons l’Afrique» (1904), dans le dessein de «pérenniser» la grandeur de la France il se posait deux questions fondamentales: «Où renaître ? Comment durer ?»

Qu’est-ce qui a changé de nos jours ? La Francophonie est malheureusement encore perçue comme la continuation de la politique étrangère de la France dans ses anciennes colonies. Repenser la Francophonie ce n’est pas seulement «protéger» la langue française qui, du reste n’est pas du tout menacée comme on a tendance à le proclamer dans un élan d’auto-flagellation propre à la France. La culture et la langue françaises gardent leur prestige sur le plan mondial.

En finir avec la politique “françafricaine”, par Alain Mabanckou

Les meilleurs spécialistes de la littérature française du Moyen-Âge sont américains. Les étudiants d’Amérique du Nord sont plus sensibilisés aux lettres francophones que leurs camarades français. La plupart des universités américaines créent et financent sans l’aide de la France des départements de littérature française et d’études francophones. Les écrivains qui ne sont pas nés en France et qui écrivent en français sont pour la plupart traduits en anglais: Ahmadou Kourouma, Anna Moï, Boualem Sansal, Tierno Monénembo, Abdourahman Waberi, Ken Bugul, Véronique Tadjo, Tahar Ben Jelloun, Aminata Sow Fall, Mariama Bâ, etc. La littérature française ne peut plus se contenter de la définition étriquée qui, à la longue, a fini par la marginaliser alors même que ses tentacules ne cessent de croître grâce à l’émergence d’un imaginaire-monde en français.

Tous les deux, nous avions eu à cet effet un échange à la Foire du livre de Francfort en octobre dernier, et je vous avais signifié publiquement mon désaccord quant à votre discours d’ouverture dans lequel vous n’aviez cité aucun auteur d’expression française venu d’ailleurs, vous contentant de porter au pinacle Goethe et Gérard de Nerval et d’affirmer que «l’Allemagne accueillait la France et la Francophonie», comme si la France n’était pas un pays francophone!

“La colonisation fut coupable de pas mal de crimes…”, par Maryse Condé.

Dois-je rappeler aussi que le grand reproche qu’on adresse à la Francophonie «institutionnelle» est qu’elle n’a jamais pointé du doigt en Afrique les régimes autocratiques, les élections truquées, le manque de liberté d’expression, tout cela orchestré par des monarques qui s’expriment et assujettissent leurs populations en français? Ces despotes s’accrochent au pouvoir en bidouillant les constitutions (rédigées en français) sans pour autant susciter l’indignation de tous les gouvernements qui ont précédé votre arrivée à la tête de l’Etat.

Il est certes louable de faire un discours à Ouagadougou à la jeunesse africaine, mais il serait utile, Monsieur le Président, que vous prouviez à ces jeunes gens que vous êtes d’une autre génération, que vous avez tourné la page et qu’ils ont droit, ici et maintenant, à ce que la langue française couve de plus beau, de plus noble et d’inaliénable: la liberté.

Y a-t-il une littérature noire ? Le grand dialogue Laferrière-Mabanckou

Par conséquent, et en raison de ces tares que charrie la Francophonie actuelle – en particulier les accointances avec les dirigeants des républiques bananières qui décapitent les rêves de la jeunesse africaine –, j’ai le regret, tout en vous priant d’agréer l’expression de ma haute considération, de vous signifier, Monsieur le Président, que je ne participerai pas à ce projet.

Alain Mabanckou Santa Monica, le 15 janvier 2018.

Diaspora africaine: Antilles, Guyane, Africains en Europe, Haïti...Que peut donner cette réforme pour la dignité des peuples africains ou d'origine africaine de Macron dans cette «Francophonie qui va mal» ?

Diaspora africaine: Antilles, Guyane, Africains en Europe, Haïti…Que peut donner cette réforme pour la dignité des peuples africains ou d’origine africaine de Macron dans cette «Francophonie qui va mal» ?

*En langue internationale Lingala. “Ndimbola ya bampanzi nsango ya biso (notes de notre rédaction du journal ):d es journalistes panafricains qui sont actuellement dans MAGAZINE NGAMBO NA NGAMBO participent depuis le 7 février 1981 (Suisse,Lausanne) à des promotions des langues africaines. Ils n’ont pas attendu la décision de l’ONU, via son institution UNESCO de proclamer le 21 février 2000 «La Journée internationale de la langue maternelle». Cette Journée est célébrée annuellement depuis cette date.

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